Le Silence du Dimanche

C’est toujours le dimanche que ça me tombe dessus.
Le matin, je me lève tard, j’ouvre la fenêtre sur la cour, j’écoute les pigeons battre des ailes sur les tuiles.
Je fais du café, je laisse la radio en sourdine, mais il y a ce silence épais qui s’installe, comme un drap qu’on n’arrive pas à secouer.
Je pense à mon père, à ses dimanches à lui, toujours debout avant tout le monde, à bricoler dans le garage, à s’inventer des urgences pour ne pas rester assis.
Moi, je ne bricole rien. Je tourne en rond dans mon petit appartement, je regarde les ombres bouger sur le parquet, je me demande si quelqu’un pense à moi.
Parfois, je m’assois par terre, dos au radiateur, et je laisse venir les souvenirs : les rires d’enfants dans la rue, l’odeur du pain grillé, la voix de ma mère qui chantonne.
Le dimanche, c’est le jour où je me sens la plus vivante et la plus seule à la fois.
Je crois que c’est ça, grandir : apprendre à apprivoiser le silence, à le regarder en face, sans baisser les yeux.